Affaire Nahel : Ce que cette tragédie nous enseigne (vraiment) sur la légitime défense aujourd’hui en France

Le 27 juin 2023 à Nanterre, un adolescent de 17 ans, Nahel Merzouk, est tué par un tir de policier lors d’un contrôle routier. L’affaire fait rapidement le tour des médias, des réseaux sociaux, des plateaux télé. Des émeutes embrasent le pays. Et aujourd’hui, le policier auteur du tir est renvoyé devant une cour d’assises pour meurtre. Une décision qui soulève, au-delà de l’émotion, des questions profondes sur la manière dont la justice traite la légitime défense en France.
Cet article n’a pas pour but de désigner un camp ou de raviver des tensions. Il vise à éclairer, à partir des faits et du droit, ce que cette affaire dit de l’état de notre système judiciaire, et de ses conséquences sur ceux qui agissent encore avec courage et responsabilité dans un monde où beaucoup choisissent la passivité.
Les faits : une affaire complexe et tendue
Le dossier décrit une succession d’événements : refus d’obtempérer, mise en danger de piétons, conduite sans permis, et enfin un véhicule bloqué par d'autres voitures. Deux policiers descendent pour interpeller Nahel. Celui-ci redémarre. L’un des policiers tire. Nahel meurt.
Les expertises confirment que le tir a été dévié par le mouvement du véhicule et visait initialement les jambes. Elles confirment aussi que le démarrage du véhicule a nécessité 4 actions volontaires consécutives. Les deux passagers du véhicule contredisent plusieurs fois leur propre version, que les expertises viennent infirmer.
Malgré tout cela, les juges ont considéré qu’il y avait "intention de tuer" et "absence de légitime défense". Le policier est donc poursuivi pour meurtre. Les faits qui précèdent le tir, pourtant essentiels pour comprendre l’état de tension et d’urgence dans lequel l’intervention a lieu, sont écartés de l’analyse... tout comme le fait que Nahel soit un récidiviste et le policier, quant à lui, possède des états de services irréprochables.
Quand les juges déconnectent le droit de la réalité
C’est ici que le malaise commence. La justice affirme que le policier aurait dû :
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attendre les renforts (alors même que le véhicule pouvait repartir à tout instant)
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ne pas tirer à bout portant (alors qu’il était plaqué contre la voiture)
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et tirer dans les jambes sans les voir clairement (tout en reconnaissant que le tir a été dévié par le mouvement du véhicule).
Cette lecture froide, presque mécanique, ne prend aucunement en compte la réalité d’une intervention sous tension : la peur, le stress, l’urgence, la responsabilité de protéger les passants.
Et surtout, elle fait abstraction d’une jurisprudence pourtant claire : celle qui admet la "sensation de danger raisonnable" comme fondement de la légitime défense. Cette jurisprudence, y compris celle de la Cour européenne des droits de l’Homme, a été balayée par les juges. Ces derniers ont même affirmé que les policiers ne pouvaient raisonnablement pas ressentir de danger.
C’est à ce moment précis que la déconnexion devient choquante.
L’inversion des rôles : quand la justice frappe les gens biens
Ce que beaucoup ressentent – et ce que cette affaire illustre cruellement – c’est l’inversion totale des responsabilités :
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Les délinquants récidivistes, sans permis, dangereux, sont présentés comme des victimes systémiques.
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Les policiers, les citoyens, ceux qui jusqu’ici vivaient sans tâche, sont jugés avec une sévérité absolue au premier faux pas.
Ce deux poids deux mesures alimente un malaise croissant. La justice paraît dure avec les justes, indulgente avec les violents.
Le sentiment d’injustice n’est plus un fantasme : il se nourrit de cas réels. Comme ce citoyen ayant retenu un cambrioleur, accusé ensuite de séquestration. Ou ce propriétaire, dont le domicile est squatté, qui tente de reprendre possession de son bien... et se retrouve lui-même poursuivi.
Les juges semblent parfois vivre dans un univers où l’agresseur est toujours déséquilibré, et le défenseur toujours excessif.
Pire : sachez qu'aujourd'hui, certains juges vous considèrent comme une "arme létale" parce que vous pratiquez un art martial... comme si l’entraînement au dojo était transposable, sans stress, sans peur, sans chaos, dans une agression réelle.
Les conséquences silencieuses d’un tel jugement
Ce jugement envoie un message clair, mais terrible :
"Si vous êtes policier et que vous agissez, vous pouvez finir en prison."
"Si vous êtes citoyen et que vous réagissez à une agression, vous serez peut-être poursuivi."
Le risque ? Que ceux qui, hier, se portaient au secours des autres n’osent plus agir. Que les policiers hésitent à intervenir. Que les citoyens regardent ailleurs. Que la peur de la justice l’emporte sur la peur de l’injustice.
Cette passivité, ce renoncement, c’est le plus grand cadeau que la justice puisse faire aux prédateurs. Car eux, ne se posent jamais la question de la proportion, de la jurisprudence, ou de la responsabilité pénale.
Quand la justice a peur de la justice
Le fond du problème est peut-être là : certains juges ont aujourd’hui peur de défendre ce qui est juste.
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Peur d’être accusés de partialité.
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Peur de soutenir un policier et d’être traités de complaisants.
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Peur de reconnaître qu’un homme peut agir avec force sans être coupable d’une dérive autoritaire.
Il est devenu plus "sûr" pour un juge de plaider la complexité du parcours du délinquant que le devoir du citoyen courageux. Plus prudent de condamner un excès de zèle que de reconnaître un acte responsable dans une situation extrêmement tendue.
Cette justice n’est pas aveugle. Elle ferme les yeux sur certains, et scrute les autres à la loupe.
Conclusion : et si vous êtes quelqu’un de bien ?
Ce que l’affaire Nahel nous apprend, tragiquement, c’est que le fait d’être quelqu’un de bien ne vous protège plus. Ni votre passé, ni votre droiture, ni vos services rendus.
Dans certaines lectures judiciaires contemporaines, ce qui compte, ce n’est plus votre intégrité, mais votre conformité à des réglements abstraits. Vous pouvez avoir sauvé des vies pendant 20 ans, et voir votre carrière s’écrouler en 20 secondes, parce qu’un juge, deux ans plus tard, aura estimé que vous auriez pu attendre... un peu plus.
Alors, oui, ce que cette affaire nous enseigne, c’est qu’il faut aujourd’hui être prêt à se défendre deux fois :
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Sur le terrain, face aux agressions, au chaos, aux menaces.
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Devant la justice, face aux suspicions, aux jugements à froid, et aux idéologies.
Ceux qui veulent rester debout, forts, lucides et justes, doivent désormais intégrer cette nouvelle réalité.
Et continuer, malgré tout, à faire ce qui est juste. Car si nous cessons, alors le chaos, lui, n’hésitera pas à avancer.